O.J. Simpson et la révolution du monde de l’information 

Le joueur de football américain et vedette de cinéma O.J. Simpson est décédé le 10 avril dernier. Il était également connu pour ses démêlés judiciaires et pour avoir marqué, bien malgré lui, l’histoire des communications en symbolisant une révolution dans le monde de l’information et des médias.

Très tôt dans sa carrière, O.J. Simpson s’est retrouvé omniprésent dans les médias, plus particulièrement à la télévision. Il le sera d’abord en tant que joueur de football américain avec les Bills de Buffalo entre 1969 et 1977 et les 49ers de San Francisco entre 1978 et 1979.

Immensément populaire, O.J. Simpson était surnommé «The Juice» en référence à ses initiales, qui sont les mêmes que l’abréviation de «orange juice». Cette popularité l’a amené à participer à plusieurs publicités, notamment pour General Motors, Hertz et, en raison de son surnom, pour les jus d’orange Treesweet.

Parallèlement à sa carrière de joueur de football, et surtout après sa carrière sportive, il était encore devant les caméras pour des rôles à la télévision et au cinéma. On a pu notamment le voir dans La Tour infernale (The Towering Inferno), dans la série de films L’agent fait la farce (The Naked gun) de même que dans la télésérie Racines (Roots).

Malgré cette omniprésence à la télévision durant sa carrière de footballeur et d’acteur, ce n’est pas de cette façon qu’O.J. Simpson a révolutionné le monde de l’information et des médias. C’est plutôt lors de la fameuse «affaire O.J. Simpson» associée au meurtre de son ex-femme Nicole Brown Simpson et de son ami Ron Goldman.

Ce qui a révolutionné le monde de l’information, c’est la poursuite d’O.J. Simpson dans les rues de Los Angeles à bord d’une Ford Bronco blanche, diffusée en direct à la télévision devant environ 95 millions de téléspectateurs le 17 juin 1994, grâce à des hélicoptères filmant la scène. Encore à ce jour, cet événement reste l’un des plus regardés de l’histoire de la télévision, dépassant même les audiences des Super Bowls de l’époque.

Les chaînes d’informations câblées, comme les chaînes généralistes, vont diffuser l’événement en direct en interrompant leur programmation habituelle. Des statistiques démontrent que les livraisons de pizza auraient considérablement augmenté durant cet événement car de nombreux téléspectateurs ne voulaient pas quitter des yeux leur télévision.

Cet événement a révolutionné le monde des médias car il a marqué un tournant où l’intérêt du public a commencé à prendre plus d’importance que le jugement éditorial. La poursuite télévisée d’O.J. Simpson a mis en lumière la tendance des médias américains à privilégier le sensationnalisme à l’information pour plaire à leur public.

Le procès qui a suivi est également notable d’un point de vue de communication, car il donnait l’impression d’avoir été conçu pour la télévision. O.J. Simpson a finalement été acquitté au pénal en 1995, mais jugé coupable au civil en 1997.

CNN, première chaîne d’information en continu, a été lancée en 1980, révolutionnant le paysage médiatique mondial en proposant une couverture d’actualité 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Le succès de CNN a ouvert la voie à d’autres chaînes d’information dont Fox News et MSNBC aux États-Unis de même qu’au Canada CBC News Network en 1989 et RDI, Réseau de l’information, en 1995.

La création de ces chaînes d’information en continu a renforcé l’importance de la couverture en direct, avec des caméras fixes sur les lieux d’événements en attendant des développements spectaculaires. La poursuite de O.J. Simpson à travers les autoroutes de Los Angeles représente un événement en direct qui, même s’il a été populaire auprès des téléspectateurs, tenait davantage du spectacle que de l’information.

Cet événement, survenu avant l’arrivée d’internet dans les foyers, a été précurseur de l’époque actuelle où, dans le monde des communications, les sites Internet cherchent à attirer des clics avec des titres sensationnalistes, tandis que les réseaux sociaux tentent de monétiser l’attention de leurs utilisateurs. Cet attrait existe cependant depuis bien plus longtemps puisque, déjà au XIXème siècle, l’écrivain français Émile Zola déclarait que «le goût de l’actualité aidant, nous en sommes arrivés à cette fièvre d’informations immédiates et brutales».