Un passage de Pierre Poilievre dans les Maritimes a pris une étrange tournure, cette semaine, lorsque le leader conservateur s’est joint à un groupe de manifestants réunissant des anti-Trudeau, des partisans de Donald Trump et des sympathisants de l’extrême droite. Est-ce trop demandé à nos politiciens de rechercher de meilleures fréquentations?

Pierre Poilievre attise la grogne de la population envers la tarification du carbone, une mesure phare du premier ministre Justin Trudeau. Il organise régulièrement des rassemblements un peu partout au Canada.

Il n’est pas le seul à miser sur l’opposition à cette taxe pour promouvoir son agenda. Différents groupes, certains plus extrémistes que d’autres, s’inspirent du convoi dit de la liberté, qui a occupé le centre-ville d’Ottawa, en janvier et février 2022, pour atteindre leurs objectifs.

M. Poilievre était tout près de la frontière séparant le Nouveau-Brunswick de la Nouvelle-Écosse, plus tôt cette semaine, quand il a aperçu un campement de manifestants. Il a décidé de façon impromptue d’aller à leur rencontre. Il a serré des mains, encouragé le groupe à poursuivre son combat et salué ce qu’il a qualifié de «bonne vieille révolte fiscale canadienne».

On retrouve dans le campement, érigé au début avril, les symboles et slogans habituels: un drapeau Fuck Trudeau, une auto avec les mots Make Canada Great Again et bien sûr le slogan Ax the tax répété si souvent par M. Poilievre.

À un certain moment, le chef conservateur est entré dans une roulotte. Sur celle-ci était peint le drapeau noir et blanc de Diagolon, une communauté en ligne prisée par l’extrême droite canadienne. Selon la GRC, Diagolon fait partie d’une mouvance selon laquelle l’effondrement des gouvernements occidentaux et une guerre civile sont inévitables et qu’il faut accélérer le processus.

Soyons honnêtes. M. Poilievre ne croyait certainement pas qu’il risquait d’être associé à Diagolon quand il s’est présenté devant ce groupe de pseudo-résistants.

Il courtise néanmoins cette tranche de la population. Il parle même leur langage, en faisant référence à une «révolte» en cours.

N’attendez pas de mea-culpa ni de regrets de sa part.

Il est toujours risqué pour les politiciens de participer à un bain de foule. Ceux-ci peuvent être injustement associés aux paroles des gens présents. Ils doivent donc faire preuve de jugement. Certains événements sont plus susceptibles que d’autres de regrouper les intolérants.

Prenez le mouvement 1 million 4 children. Le 20 septembre 2023 , sous le prétexte de défendre les droits des enfants, tout ce qu’il y a d’homophobes et de transphobes au Canada ont participé à une série de manifestations. La plupart des politiciens au Canada se sont tenus loin de ces rassemblements, avec raison.

Au Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs n’a pas eu la même retenue. Il a fièrement participé à cette manifestation homophobe. Il a sympathisé avec les marcheurs, ignoré les contre-manifestants et posé devant des affiches présentant les enseignants et les transsexuels comme étant des groomers, c’est-à-dire qu’ils créent un lien de confiance avec des enfants afin d’éventuellement les agresser sexuellement.

Rarement un premier ministre néo-brunswickois a-t-il agi aussi honteusement que ce jour-là, à Fredericton.

Pierre Poilievre a été plus prudent cette semaine.  Il a même refusé d’être pris en photo devant un drapeau Fuck Trudeau. Il a voulu montrer qu’il était proche du peuple dans les médias sociaux, mais n’a pas fait preuve d’autant d’enthousiasme que Blaine Higgs lors de la manifestation de Fredericton contre les droits des élèves transsexuels. Il ne pouvait pas deviner, en descendant de son véhicule, qu’il allait être associé à Diagolon et à ses valeurs intolérantes et extrémistes.

Ses prédécesseurs Andrew Scheer et Erin O’Toole ont été accusés par les membres les plus radicaux de leur parti d’avoir renié les valeurs de la droite conservatrice religieuse. Même chose pour le premier ministre albertain Jason Kenney, qui a été poussé vers la porte de sortie après avoir imposé des mesures sanitaires pendant la pandémie.

Le chef conservateur ne veut pas subir leur sort ni répéter leurs erreurs. C’est légitime.

M. Poilievre doit néanmoins agir de façon plus responsable. Il doit cesser de courtiser les extrémistes et plutôt séduire les Canadiens qui en ont assez du gouvernement Trudeau et qui hésitent malgré tout à se tourner vers lui.

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