L’Assemblée législative du Nouveau-Brunswick sera en pleine effervescence, mardi matin, alors que le ministre des Finances Ernie Steeves déposera le budget du gouvernement provincial. De nombreux élus municipaux, représentants d’associations et intervenants seront sur place pour comprendre et réagir publiquement aux mesures qui seront annoncées. Des gens voudront peut-être manifester leur mécontentement. Tous agiront en respectant des règles très strictes.

L’Assemblée législative est un milieu aseptisé. Le comportement des personnes qui en franchissent la porte est régi par des règles et des conventions qui datent dans certains cas à plus d’un siècle.

Les députés doivent en tout temps respecter un décorum. Ils n’ont pas la permission de s’adresser directement à un député d’un autre parti pendant la Période des questions et autres travaux législatifs. Ils doivent plutôt parler au président de la législature.

Les ministres portent le titre d’honorable; le premier ministre est considéré comme étant très honorable. Dans l’enceinte même de l’Assemblée, le veston et la cravate sont obligatoires.

Les personnes qui ne suivent pas ces règles le font à leurs dépens. Un député qui insulte un adversaire pendant la Période des questions se verra ordonner de retirer ses propos. S’il refuse d’obtempérer, il sera expulsé de la législature et ne pourra y retourner tant qu’il ne reviendra pas sur ses paroles à la satisfaction du président.

De leur côté, les visiteurs ne doivent pas perturber les travaux législatifs, sous peine d’expulsion. C’est le sort qui a été récemment réservé à Steve Drost, Sandy Harding et Sharon Teare, du Syndicat canadien de la fonction publique.

Le gouvernement Higgs a adopté un projet de loi imposant un régime de retraite à risques partagés pour environ 16 000 employés et retraités de la fonction publique. La mesure touche surtout le milieu scolaire et les foyers de soins.

Le SCFP mène une guerre sans merci afin de préserver le régime à prestations déterminées dont jouissent ses membres. Ils n’ont jamais accepté, en négociations, de l’abandonner. Leur lutte est légitime. Nous comprenons leur frustration devant la décision unilatérale du gouvernement.

Le 12 décembre 2023, ils ont cependant dépassé les bornes.

Ce jour-là, les syndiqués se sont présentés en grand nombre dans la tribune des visiteurs en ayant comme objectif d’empêcher le vote d’avoir lieu. Ils ont chahuté, crié des slogans et chanté des chansons afin d’enterrer les débats sous le bruit.

Dans d’autres circonstances, le président de l’Assemblée législative aurait mis fin aux travaux le temps de ramener l’ordre. Les députés ont néanmoins décidé de poursuivre les débats malgré le cirque ambiant. Le projet de loi a finalement été adopté.

Quelques jours plus tard, la sanction est tombée. M. Drost, Mme Harding et Mme Teare ont été bannis.

Ce comportement était intolérable. Les syndicats ont des fonds, de la visibilité, une grande force de mobilisation et la capacité de mener des campagnes de publicité et d’organiser des manifestations. Ce n’est pas vrai que leur seul outil pour se faire entendre est de semer le chaos à la législature pendant que les députés font leur boulot.

Les leaders syndicaux ne devraient pas être surpris d’avoir été sanctionnés, puisqu’il existe des précédents.

Avant d’être député, Kevin Arseneau a été membre de l’Union nationale des fermiers. En avril 2015, il s’est adressé aux députés qui siégeaient à partir de la tribune de l’Assemblée législative, ce qui est interdit. Il a ensuite été banni. Ce n’est qu’après avoir été élu président de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick que la sentence a été levée, l’année suivante.

Le pouvoir du président aurait par contre avantage à être mieux balisé. Il laisse une grande place à l’arbitraire. C’est ainsi qu’en 2020, la police de Fredericton est intervenue à la suite d’une décision du président de l’Assemblée législative visant à empêcher «pour des raisons de sécurité» des manifestantes pro-choix d’ériger des tentes où elles prévoyaient passer la nuit. Nous avions à l’époque dénoncé en éditorial cette mesure excessive.

Il n’existe pas de processus de révision des décisions rendues par le président. Nous croyons qu’il est possible et souhaitable d’améliorer la transparence, tout en restant ferme quand la situation l’exige.

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